dimanche 9 septembre 2012

Mongolie - Jour 14-15

 Comme il nous reste un peu de temps avant le départ de l'avion qui nous ramènera à UB, nous visitons un temple bouddhiste très récent. Comme toujours, difficile d'obtenir une traduction des conversations tenus entre notre traductrice et la moines.
Une fois à l'aéroport avec quelques heures d'avance inutiles, notre avion arrivera avec au final plus de deux heures de retard. Il fait donc complètement nuit quand nous nous posons à UB, et après un rapide repas, nous partons nous coucher dans les yourtes non sans avoir pris, Ô bonheur oublié, une douche tiède, dans une vraie salle de bain, avec murs,sol et plafond !

 Le lendemain , pluie quasiment toute la journée. Après une visite extrêmement intéressant du musée National de Mongolie retraçant les grandes lignes de l'histoire générale de la nation, nous prenons l'après-midi à faire quelques emplettes.
Ulan-Battor est une ville sale (2ème ville la plus polluée du monde), bruyante, désagréable. Même s'il est toujours vrai qu'on ne peut juger aucun pays d'après sa capitale, nous touchons ici un extrême; il s'agit en gros exactement de l'opposé de ce que peut être la Mongolie. UB est sans cesse dans les bouchons automobiles (la notion de route goudronnée n'existe pas toujours, mais cela ne semble pas gêner les conducteurs qui n'hésitent pas à doubler en roulant sur les trottoirs, entre les deux files, à sens inverse, sur les talus ...).
Le look des gens est aussi très spécial. Si pour les hommes ce sera soit une tenue traditionnelle mongole (surtout  les gens âgés ) ou un tenue décontractée, les filles adoptent en général (même les moins jeunes) un look très voyant, très coloré, très court et provoquant (mais sans que leur attitude corporelle soit pourtant en elle-même provoquante).




Le soir venu, nous serons conviés à assister à un spectacle joué par des professionnel sur différents arts mongols (chant, danse, musique) qui s’avérera beaucoup plus intéressant que je ne l'avais craint.
Retour au campement, dernière nuit et décollage le lendemain. Mon plus gros regret sera que le voyage s'achève à UB. Ces deux derniers jours étaient tellement en dessous de tout ce que nous avons pu vivre jusqu'ici !
Le voyage du retour sera long, la reprise difficile. Mais ... quel voyage !

La Mongolie en quelques chiffres, cela aura été :

1 chute de cheval de notre compagnon (oui, oui, c'est le cheval qui est tombé, bien sûr :p). Heureusement, pas de bobo. Sachant que j'étais persuadé que je trouverais le moyen de tomber moi-même voire de me faire mal, on s'en est bien sortis.

2 lessives à l'anciennes dans les rivières, à faire sécher le linge comme  on pouvait. (vive les machine à laver !)

3 superbes et fabuleux chevaux qui nous ont accompagnés avec patience (pas toujours) et délicatesse (euh ... non, pas avec délicatesse en fait )
3 compagnons touristes qui auront été fabuleux et nous auront fait rire tout le long, même quand les situations ne s'y prêtaient pas forcément.

4 accompagnateurs mongols qui, même si on reste français et qu'on râle beaucoup, auront été supers. Une belle pensée pour Inchbald (Bernardo, le guide pédestre sourd-muet) et Ayuna (la cuisinère), frêres et soeurs,  qui auront illuminés à leur manière notre séjour

5 bains complets dans des rivières de plus en plus glacées. Moi qui refusais de me baigner dans une eau à une température inférieure à 25°, cela aura été ... revigorant !

Beaucoup  de chevaux, de chèvres, de moutons, de yaks, d'aigles, de buses, de belettes, de mulots, d'animaux de toutes sortes. On aura même entendu un loup au loin ! On a eu l'occasion de se faire réveiller par des yaks, de caresser un aigle, de galoper avec des chameaux, de voir un rapace chasse et même de se faire courser par un veau !

Trop de cigarettes fumées (mais à 30 centimes le paquet, ça ne compte pas, si ?)

Depuis que nous sommes revenus en France, à chaque fois qu'on me demande comment s'est passé ce voyage, je n'arrive pas à trouver les mots; non pas qu'il ne soit pas possible à raconter, mais tout ce qu'on a pu vivre est tellement éloigné de tout ce que l'on peut connaitre ici ... Même si la phrase est clichée, je pense qu'il faut seulement le vivre pour comprendre.
La dernière phrase de la brochure de l'agence avec laquelle nous sommes partis disait "Nous vous souhaitons que ce soit le voyage de votre vie". Oui, on n'en est pas loin. Vraiment. 

Mongolie - Jour 13

Dernier réveil dans les montagne, et à peine sorti de la tente, je cherche évidemment nos chevaux des yeux; mais ceux-ci sont bel et bien restés chez eux, dans ces hauts plateaux verts et sauvages.
Le petit déjeuner trainera en longueur, un peu moins joyeux que d'habitude. Nous reprenons rapidement la route en camion, toujours aussi chaotique, toujours aussi éprouvant. L'arrivé sur Khovd quelques heures plus tard se fera par les hauteurs, nous donnant l'occasion de voir la ville en entier, à moitié composée de bâtiment en dur, au centre, à moitié composée de yourtes et de troupeaux dans sa périphérie.
Nous établissons le campement au même endroit que le premier jour et décidons rapidement de partir revoir les inscriptions gravées dans la pierre aperçues lors du premier jour. Cette fois-ci, j'ai mon appareil photo, tout va bien. Nous repartons ensuite "visiter" Khovd. La ville s'avère dans la même veine qu'Ulan Bator (bâtiments carrés, en bon béton qui dure, dans le style architectural dénué de toute recherche esthétique qui caractérisait si bien l'ancien bloc soviétique).



Le plus surprenant restant les rapaces : on peut facilement comparer la population de rapaces (buses,vautours et corbeaux) de la ville à la population de pigeons de Paris ! Il y en a partout, à peine suffit-il de lever les yeux tant ils volent bas. Voir un busard posé sur des poteaux électriques en ville est quelque chose de spécial. De même que de voir des vaches ou veaux égarés dans les rues. Il s'agit tout de même de la seconde plus grande ville de Mongolie !

Nous faisons un tour au marché, puis allons visiter l'ancienne citadelle. Tout ce qu'il en reste étant un bout de mur d'enceinte abîmé et usé, il est difficile d’apprécier le spectacle. D'autant qu'après tous ces jours passés en pleine nature sauvage, nous avons un peu de mal à nous acclimater à nouveau aux voitures et aux klaxons.
Comme il s'agit de notre premier jour sans équitation/marche depuis plus d'une semaine, c'est aussi toute la fatigue accumulée, toutes les courbatures et problèmes d'estomac qui nous tombent dessus les uns après les autres.

Le repas du soir sera difficile aussi. Le mouton tué lors du début du voyage à réussi à nous contenter tout le long, mais si dans les montagnes l'air est frais et peut conserver les aliments, les restes de viande ont mal supporté ce retour à la civilisation; et de petits insectes ont élu domicile dans les restes de viandes et pataugent allègrement dans notre soupe du soir. Nous nous contentons donc de pain et de salade.
La journée à été courte et longue à la fois, après une dernière partie de carte tous ensemble, nous allons nous coucher déjà nostalgiques.

Mongolie - Jour 12

La nuit s'est avérée agitée, et la pluie et tombée longtemps sur les toits de toile de nos tentes. Comme nos compagnons avaient décidé de partir très tôt pour aller crapahuter sur le début du glacier, j'en profite pour me lever plus tôt qu'habitellement afin de les voir partir. L'ouverture de la tente semble forcer, et après avoir repoussé ce qui semble être un poids sur la tente, le haillon s'ouvre sur ... un paysage entièrement blanc : il a neigé pendant la nuit ! Encore une expérience spéciale : se reveiller sous la neige. Les dernières chutes ont eu lieu récemment semble-t-il et la visibilité à cette heure est quasi-nulle. C'est à peine si je peux distinguer les autres tentes du camp dans ce brouillard blanc.
Je retrouve nos compagnons qui sont aussi surpris que moi, est légèrement déçu : avec ces chutes, l’ascension n'est plus envisageable : même s'il n'y a que quelques centimètres à notre altitude, le glacier doit être bien plus atteint. Nous attendrons quasiement deux heures, dans l'espoir de retrouver une visibilité relative, mais force est de constater que nos projets de la journée vont être compromis. Même reprendre le cheval nous semble trop risqué. Nous en faisons part à Jaggi qui sourit. Lui non, ça ne l'inquiète pas, mais il comprend. 10 minutes plus tard, le voilà déjà sur sa monture, entrainant nos trois chevaux à sa suite dans le brouillard, avec toute l'adresse et l'aisance du mongol gardien de troupeau.
A peine disparaît-il dans le brouillard que le temps se dégage. Trop tard, nous partirons en camion ce matin.
Pendant que le reste de l'équipe prépare le camion, nous nous avançons sur la route à pied, admirant le glacier enneigé qu'on commence enfin à pouvoir distinguer. La vue est magnifique, plus rien à voir avec la vision d'hier d'une montagne avec quelques flaques de glace; désormais, la montagne entière est blanche. Chemin faisant, nous nous aperçevons que nous sommes dans un champ remplis de beaux et gros champignons. Le ramassage ne tarde pas, et lorsque le camion nous rejoint quelques minutes plus tard, nous avons rempli un sac entier. En nous voyant arriver avec notre trouvaille, le cri parmi l'équipe est unanime : 'poison, poison !' ... un peu surpris , nous cherchons à en savoir plus et découvrons avec étonnement que les mongols ne mangent jamais de champignons. Ne sachant les reconnaitres, ils préfèrent considérer que tous sont dangereux. Nous décidons que nous les préparerons le soir même pour leur faire goûter.
Le trajet en camion s'avère au final beaucoup moins confortable et plus risqué qu'à pied ou à cheval. Il s'agit de vieux camions militaires russes pouvant certes passer n'importe où, mais la notion de passagers semble avoir été reléguée au second plan. Sous le prétexte de photos ou autres excuse, nous ménagons des pauses environ toutes les demi-heures pour pouvoir apaiser nos estomacs peu habitués à tant de chaos.
L'après-midi commence à peine et nous sommes redescendus de plusieurs centaines de mètres d'altitude quand nous nous arrettons devant une yourte sur un grand plateau de montagne : il s'agit de la yourte de Yagi, le guide équestre, qui est déjà arrivé depuis longtemps avec nos chevaux.
Retrouvailles avec nos amis équidés, et avec surprise, on nous annonce qu'on va nous emmener au 'magasin' à côté acheter du tabac. Coup d'oeil à droite, coup d'oeil à gauche, le plateau est immense, vert, parsemé de troupeaux de chevaux et de quelques yourtes, pas de 'magasin' en vue. Dociles, nous suivons le guide, en profitant pour reprendre les chevaux pour un dernier galop; le 'magasin' s'avèrera être tout simplement une yourte comme les autres, mais dont le propriétaire vit de commerce de matériel de première nécessité plutôt que d'élevage de troupeaux. Surprenant.
Nous arrivons enfin à convaincre notre compagnon marcheur de s'essayer à l'équitation, Yagi lui attribue mon petit cheval pour une balade qui se passera bien. Il ne pouvait décemment pas partir de Mongolie sans  être monté sur un de leurs chevaux !
Après être allé admiré le troupeau de chevaux que Yagi nous présente fièrement comme les siens, nous faisons notre galop d'adieu jusqu'à la yourte. Voilà, c'est le début de la fin, et nous abandonnons Yagi et nos chevaux ici. Le temps de partager le thé, l'aïrak et un peu de fromage avec sa famille, nous repartons en camion en direction de Khovd. Le trajet du retour sera morne, bien qu’agrémenté des chants mongols de Degi et Ayuna; les plaines, la montagne, toutes nos chevauchées, nous sommes en train de les laisser derrière nous.
Nous nous arrêtons à mi-chemin de Khovd pour poser notre campement presque au même emplacement que quelques jours plus tôt. Après ces derniers jours, l'eau de la rivière nous semble finalement presque chaude et, une fois le campement monté, nos compagnons commencent à laver et préparer les champignons, sous l'oeil inquiet et amusé de l'équipe mongole. Le repas du soir, notre tout dernier repas dans les montagnes, sera composé de beignets de riz et de viande (spécialité mongole) et de nos champignons cuits. Un peu hésitants, les accompagnateurs se laissent convaincre de goûter pour finalement adorer le résultat. Tous les bols seront vidés avec de grand sourire de chaque côté. Dernière goutte de la dernière bouteille de vodka, retour des moustiques, demain, départ pour Ulan Bator.

mardi 28 août 2012

Mongolie - Jour 11

Ces derniers jours, les distances parcourues quotidiennement étaient certes plus courtes (25-30 km) mais pas forcément plus reposantes pour nos chevaux. L'altitude, la raréfaction de l'oxygène, la fatigue accumulée des derniers jours. Toujours est-il que nos compagnons à quatre pattes commencent à montrer quelques signes de fatigue.
Nous quittons le plateau pour finaliser notre ascension dans une solitude accentuée par l'altitude. A ces hauteurs, il ne reste plus que la nature; nous ne croisons plus de yourte, plus de bergeries en pierre, plus aucun signe d'humains.
Par contre, nous sommes toujours accompagnés de loin en loin par quelques vautours,buses ou autres rapaces. Côtés animaux insolites, nous croisons plusieurs lièvres, mais aussi des sortes de ragondins et autres belettes (animal au nom complètement imprononçable en mongol, on a essayé !).

Après notre pause de midi, nous arrivons comme quelques jours auparavant devant un sommet qui semble impossible à traverser. Je commence à me dire que notre guide s'est à nouveau trompé, mais non. "Apparemment impossible à traverser" n'est pas mongol, et le voilà parti toujours aussi tranquillement, escaladant à cheval le col.
Nous suivons docilement mais mon petit Diesel semble vraiment peiner. J'essaie de ne pas trop le pousser étant donné qu'il est trempé de sueur à peine l'ascencion entamée. Mais cela ne s'avère pas au gout de notre guide qui m'attends puis se positionne juste derrière moi. Sur le moment, je pense à une marque de sympatie pour motiver mon cheval en l'accompagnant, mais le claquement sec de sa cravache sur la croupe de mon Diesel et le voilà en état stress avancé, commençant à paniquer et à grimper au galop la colline. La montée durera presque une demi-heure pendant laquelle le guide restera derrière moi, mais où j'essaierais sans relâche de calmer et de rassurer mon cheval.
Il est chez lui et se sont ses chevaux, je ne dis donc rien, mais dès que le passage s'avère assez large, je m'écarte le plus possible de lui; je n'avais encore jamais ressenti le stress et la peur d'un cheval, et les chevaux mongols n'étant pas franchement réceptifs à nos gratouilles et paroles d'apaisement (impossible de leur faire manger sucre ou friandise, ils refusent, habitués à un régime plus sobre), je me sens impuissant.
Une fois le col passé, chacun reprend sa place et son rythme (lui devant, moi derrière), tout va mieux.

C'est l'occasion pour nous d'admirer le panorama : nous avons atteint le glacier et pouvons le voir dans toute sa splendeur : le Mont Tsambagarav (4195m) est juste là, à portée de bras ou presque.
Établir le campement devient un véritable effort à ces altitudes, et la rivière cristalline qui coule juste à côté de nous semble toujours aussi attirante mais n'a jamais été aussi froide. A peine attachés, nos chevaux s'abattent au sol, épuisés eux aussi.


Le spectacle est saisissant, le glacier est immense et nous domine entièrement. L'instant à quelque chose d'éternel mais de triste aussi à la fois : nous avons atteint notre destination.
De leurs côté, nos marcheurs parlementent : tentera de monter sur le glacier ou ne tentera pas ? le programme pour demain est initialement de commencer à redescendre, mais l'occasion ne se représentera pas, ils préfèrenent partir en courte reconnaissance; à leur retour ils décident de tenter : si demain il fait beau, ils marcherons jusqu'au première neiges. D'autant qu'à 30 minutes d'ici ils sont tombés sur un camp de touristes italiens (nos premiers touristes croisés depuis le départ de Khovd !) soixantenaires qui venaient de le faire sans problème. Ils ont même ramené des photos d'empreinte fraiches de léopard des neige !
La soirée sera froide, et nous ouvrons la toute dernière bouteille de vodka. Toujours naifs et optimistes, nous demandons encore une fois aux accompagnateurs le temps qu'il fera demain : le ciel est sans nuage, demain il devrait faire beau mais, comme on dit en mongolie, "Le ciel sait".

Mongolie - Jour 10

Petite journée de prévue : 25 km seulement aujourd'hui. Trés vite, nous assistons à un de ces changements de décors radical auquel nous ne sommes toujours pas habitués : après les déserts de cailloux et rochers, nous sommes maintenant sur un haut plateau très vert, à l'herbe presque haute, parsemé ici et là de petits marais et mares auxquelles nos chevaux se désaltèrent et broutent volontiers. Nous voyons alors pour la première fois du voyage des 'compagnons de tentes' un peu partout sur le plateau.

Il ne s'agit pas de touristes mais de faucheurs d'herbe. En effet l'ensemble du plateau semble avoir été préservé des troupeaux et de très nombreux mongols s'activent à faucher l'herbe pour ramasser le fourrage des animaux pour l'hiver. Vu d'en haut (enfin, pas très haut pour moi avec mon petit cheval) de tout petits crop-circle semblent avoir été dessinés sur le sol. Nous nous arrêtons donc fréquemment pour saluer les différents groupes de travailleurs disséminés un peu partout jusqu'à un groupe plus conséquent. Sur un échange de sourire et de gestes avec eux, nous voilà nous aussi en train de nous essayer à la coupe de l'herbe à l'aide de leurs immenses faux (d'autant plus immenses que le mongol n'est généralement pas très grand). Le résultat ne sera pas franchement là, même notre guide n'a pas le même coup de main qu'eux; mais notre petite expérience de fauchage aura au moins eu le mérite de faire rire aux éclats les hommes et les enfants qui nous ont prêté la faux.
Le principe est (semble) simple : les hommes fauchent l'herbe à l'aide d'une grande faux en demi-cercles, avançant en ligne, chacun espacé de quelques mètres. Derrière,  les femmes et les enfants rammassent l'herbe fauchée, en font de petits tas, et les mettent sur d'immenses bâches/sacs en toile et trainent le tout jusqu'à un point de ramassage. D'autres groupes s'occupent alors enfin de charger tout ça dans le camion qui s'en va vers des destination inconnues (je suppose que le fourrage est stocké dans ces petites maisons en pierres disséminées un peu partout que nous avons croisé. Sortes de bergeries abandonnées comme on peut en voir dans les Pyrénées). Etant donné que nous n'avons pas de traductrice, il nous faut deviner tout ça, donc il est possible qu'on se trompe. Par exemple pour les tentes, je suppose que cette opération de fourrage ne durant que quelques jours mais devant rassembler beaucoup de monde, la plupart des acteurs ont préféré emmener une tente plutôt que de déplacer leur yourte.
Le spectacle fut rafraichissant après les heures solitaires des derniers jours, et après une courte pause repas/sieste sur le sol brulant de ce début d'après-midi, nous arrivons rapidement à notre campement. Là aussi l'emplacement s'avère très vert et relativement peuplé (au moins 5 yourtes nous font fasse de l'autre côté de la rivière).
Nous avions demandé la veille à la traductrice s'il nous serait possible de voir les fameux Kazakhs aigliers (chasseurs à l'aide des aigles et faucons) et elle nous avait répondu que malheureusement non, ceux-ci vivant beaucoup plus à l'ouest de notre position. C'est donc tout naturellement que ce soir, elle nous annoncé qu'en fait oui, il y en a, dont un juste à côté ... Le temps de prendre le zoom et une batterie de rechange et nous voilà en route. A peine garés, nous nous retrouvons face à face avec un aigle immense et majestueux,  attaché au pied de la yourte. Deux garçons s'approchent et parlementent avec la guide pendant qu'émerveillé je n'ai d'yeux que pour l'animal. Craintif et sauvage, celui-ci semble nous jauger du même regard. L'un des deux jeune parle anglais et nous commençons à discuter directement avec lui afin d'avoir quelques informations. Avenant, celui-ci nous amène un énorme gant de cuir , pose l'aigle dessus, et nous propose d'enfiler le gant pour "jouer" avec l'aigle. Chacun y passe. Le moment est magique. Je suis en train de réaliser un de mes plus vieux rêves d'enfant, les yeux embués, l'animal déployant ses immenses ailes au rythme du balancier de mon bras, tout près. J'ose à peine timidement lui toucher délicatement les ailes au moment de le rendre à son maître.

J'ai touché un aigle, je l'ai regardé dans les yeux à quelques centimètres. L'animal est tellement plus impressionnant ainsi, au contact, que sur n'importe quelle photo ou démonstration animalière.  Je tiens sur ma main une véritable machine à tuer, capable de soulever des animaux plus gros que lui, un animal n'ayant aucun prédateur, le roi du ciel. Ses griffes à peine serrées, je sens quand même la puissance dont il peut faire preuve. Son bec gracieux et si dangereux, ses yeux profonds et perçants, sa robe brune et dense. L'émotion et le plaisir ont rarement été aussi forts. Je sais déjà que ce sera l'expérience la plus forte du voyage, et pas seulement. Nous apprendrons que cet aigle est finalement très jeune, un an à peine, mais qu'il a quand même presque atteint sa taille finale.
Le dresseur nous emmène ensuite voir sa deuxième merveille : un faucon. Après l'aigle, le faucon semble terriblement petit. Mais pas moins dangereux. Même procédé, nous pouvons le porter sur le gant, mais pas question cette fois-ci de le toucher, l'animal est sauvage et je pourrais y perdre un doigt me dit le garçon. Plus racé, moins imposant, le faucon reste quand même un prince sans égal, capable de repérer une souris à plus de 500 mètres ! nous dit le dresseur. Il est plus âgé, 4 ans.

Pour nous remettre de nos émotions, nous sommes invités dans la yourte où nous essayons d'en savoir un peu plus sur le dressage. La traduction s'avère compliqué, la traductrice nous assurant que ce que la famille lui raconte est "trés intéressant" mais ne jugeant pas forcément utile de tout traduire, nous essayons de mélanger anglais et geste pour nous comprendre. Au final nous apprendrons uniquement les préparatifs de la chasse et compléterons nos connaissances plus tard. Le dressage en lui-même prends de ce que nous avons lu environ un an et consiste en différentes phases pour habituer l'oiseau à rester sur le poing sans bouger, à supporter les capuchons, à s'habituer à la corde quand il n'est pas en chasse, etc... ensuite, à l'approche de la saison de la chasse (les aigliers ne chassent pas toute l'année, mais principalement au printemps semble-t-il) les oiseaux sont progressivement affamés (on réduit leurs portions de nourriture) pour raviver leur instinct de chasse.
Et le point qui m'intriguait était de savoir comment peut-on lâcher un animal comme un aigle sur une proie en ayant l'assurance de retrouver les deux ?! Le moyen est finalement simple : lors de la chasse, l'animal à le bec attaché, et comme il ne chasse principalement qu'avec ses griffes, une fois la proie tuée, il ne peut la manger. Le dressage lui à alors déjà appris que, s'il attendait son maitre, celui-ci éviscérerait la proie tuée, et lui permettrait de manger donc immédiatement une partie du butin. Un simple échange de bon procédés en canalisant l’appétit de l'animal mais en maintenant actives ses incroyables capacités.
C'est heureux et l'appareil photo plein de centaines de clichés que nous quitterons nos hôtes à la nuit tombée.

Si tout va bien, demain, nous serons au pied du glacier.




lundi 27 août 2012

Mongolie - Jour 9

 Malgrè m'être exclamé que j'irais me baigner dans le lac quelle que soit la température, je n'ai pu donner suite à ce défi (mon corps m'ayant menacé d'interruption de service temporaire dû à la température beaucoup trop basse). Nous voilà repartis dans notre périple vers le glacier (notre destination finale) que nous voyons au loin depuis 2 jours maintenant.


Après avoir traversé un grand plateau très habité tant par les mongols que par les kazakh (en turc ,
kazakh signifie 'homme libre' , 'hors du troupeau' parait-il), nous faisons une courte halte auprès d'un groupe d'hommes auprès desquels notre guide doit en raconter de bonnes à notre sujet au vu des regards fréquents et amusés que ceux-ci nous lancent. Nous reprenons notre route alors hors de toute voie praticable, directement à flanc d'une colline composée principalement d'éboulis. C'est à l'occasion de cette journée que nos chevaux mongols vont nous montrer une partie de l'étendue de leur potentiel. Il est dit que rien n'arrête un cheval mongol, et au vu de leur rythme presque pas ralenti en ces chemin sur lesquels je ne me risquerais pas à pied, j'avoue que je le crois désormais tout à fait. Au début, je commence à regarder où nos chevaux posent leurs sabots, semblant deviner sans regarder où se situait la seule portion de quelques centimuètres où le sol semblait stable. Mais très vite j'arrête, laissant ma monture se diriger elle-même : elle s'en sort bien mieux sans mes craintes et conseils.

Arrivés au sommet de la colline, notre guide semble embêté. Ok, les chevaux mongols peuvent passer partout, mais là, un mur se dresse, on ne passera pas. Pause repas, puis demi-tour, même chemin, mêmes risques, même confiance en nos chevaux. Tout se passe bien. Arrivés en bas, notre guide nous fait comprendre avec un air embêté qu'en fait il s'est réellement perdu. Nous aperçevons une yourte (qui semble complètement perdu au milieu de cette mer de rochers), et après en avoir fait le tour, elle s'avère vide. Avançant un peu, nous aperçevons sur un chemin un peu plus haut un cavalier. Étrangement notre guide, plutôt que d'aller à sa rencontre comme à son habitude se concentera de siffler de loin, attendant que le cavalier vienne à nous; le pourquoi se fera vite savoir : il s'agit d'une femme. Le visage fermé, il semble s'abstenir de lui dire que nous sommes perdus et lui demandera juste où se trouve son mari que nous attendrons patiemment (pendant que les enfants curieux venus nous observer rient mais se méfient aussi en même temps). Le mari arrivé tout sourire, nous reprenons l’ascension (le mot est juste, 'ascension') depuis la vallée pour partir droit sur le camp.

Nous sommes maintenant presque à 3000 mètres d'altitude, le moindre effort me fait clairement ressentir le poids des cigarettes passées. Mais après tous ces jours passés dans les plaines, il est temps de faire une lessive. Jamais je ne me serais lavé (et encore moins n'aurait fait une lessive) dans une eau si froide. D'autant qu'ici, le terrain n'est pas plat et la rivière n'est plus qu'un mince filet d'eau. Heureusement nous avons de quoi nous réchauffer sous la tente. Même ici nous avons des voisins qui ne dérogent pas à la règle de l'accueil mongol en nous apportant fromage et lait. Enfin nous pouvons gouter le lait de yak : un régal. Des yaks justement, nous en avons croisé aujourd'hui pour la première fois et un troupeau s'est établi à côté du camp. De grosse bêtes impressionnantes (de belles vaches avec une bosse de graisse et des dreadlocks à faire palir de jalousie tous les rastas du monde). La nuit sera compliquée (terrain en pente oblige) mais réparatrice.

Mongolie - Jour 8

Au programme, montée; et on nous promet une surprise à l'arrivée. Au final, la journée se passera sur un rythme très début de western-spaghetti : sous un soleil de plomb, quatres cavaliers traversent inlassablement un désert monotone de roche et de cailloux sans croiser - presque - âme qui vive. Cette journée remportera haut la main le titre de "journée la plus ennuyeuse du séjour". Il ne s'est rien passé, mais rien. Tant au niveau du paysage que des gens aperçus au loin.

Et après 7 heures de marche forcée dans cette lande post-apocalyptique, notre guide nous indique une petite montagne que nous grimpons péniblement, et là, au détour d'une cîme caillouteuse, vision superbe et magnifique : le lac d'Oroo Nuur ! Nous sommes partagés entre la joie d'avoir quelque chose de différent du paysage de la journée, et la joie de voir cette étendue d'eau immense scintiller au creux de la chaine des montagnes. Du haut de cette colline on voit clairement les deux parties du lac (une partie salée, et une partie douce) séparées par une langue de sable d'une dizaine de mètres. La vue est époustouflante et les rochers cédant la place à l'herbe et au sable, nous filons au galop jusqu'au campement. Le vent et la pluie nous accueillent avec bonhommie. J'en profite pour recoudre la tente qui accuse son âge et nous sirotons notre thé à la vodka sous le regard toujours amusé de nos accompagnateurs sceptiques mais curieux, le temps que le soleil revienne rapidement remettre de l'ordre sur le ciel de notre soirée.

Sur une proposition de Degi, notre traductrice, nous décidons d'aller "à 10 minutes d'ici", dire bonjour aux habitants d'une yourte voisine. 45 minutes et deux rivères traversées à pied plus tard, nous arrivons trempés dans une yourte immense où deux jeunes femmes et une multitude d'enfants nous accueillent chalereusement. Nous nous retrouverons gênés quand elles nous offirons à manger leur repas du soir alors que leur dénuement semble grand, mais refuser serait une offense; c'est comme ça que nous avons mangé les meilleurs booz du séjour (spécialité mongole, il s'agit de raviolis fourrés à la viande de mouton en général).

Le soir,  nous apprendrons les règles d'un jeu de carte mongol (mélange détonnant entre le rami et la belote en gros) auquel nous prendrons vite goût.

En terme de repas, notre cuisinère - Ayuna - fera des merveilles (à la voir cuisiner toute la semaine sur un bout de planche à cuisines avec deux réchaud à gaz et deux poelles, je me sens maintenant presque honteux quand je râle sur mon matériel de cuisine); avec l'ensemble des victuailles emportées en début de séjour, elle essaiera de nous préparer quotidiennement des repas originaux. Même si le repas du soir sera presque toujours composé d'une soupe épaisse aux multiples épices, à base principale de viande et de pates, nos petits bento du midi seront généralement plus variés. Nous aurons l'occasion de gouter différents aspects de la cuisine mongole (je n'ai pas retenu le nom de tous les plats, mais on s'est régalés.); le seul point noir des repas à ce stade concernera le tout premier jour où, en guise d'apéritif d'accueil, ils nous ont servi de petits morceaux froids de langue, de foie et de tripes de mouton ... et "bienvenue en mongolie !". Heureusement le reste des repas aura été beaucoup moins difficile à aprécier.

Mongolie - Jour 7

Le campement à été établi pour cette nuit dans une zone très vivante (surtout par rapport au désert traversé hier). Troupeaux de vaches, de chevaux, de chèvres nous entourent et également quelques yourtes (dont celle de la soeur de Jagi, notre guide équestre), mais également une espèce de restaurant/café/dortoir/magasin où nous nous sommes abrités la veille. La rivière est large et coule à flot, le reveil sous la lumière rasante propres aux vallées montagneuses est magnifique.
Le programme du jour est de faire une petite boucle dans une zone montagneuse proche du camp. Impossible d'en savoir plus. J'espère vaguement - sans trop y croire non plus - croiser la route de loups (nous apprenons qu'un des poulins installé près du camp avec une plaie conséquente aux postéireurs à déjà été attaqué par ceux-ci, et la veille nous en avons entendu un au loin), mais aussi croiser la route d'hybex, animal mongol proche de nos bouquetins mais en plus gros et plus sauvage. Nous voilà donc partis de notre côté en train de déambuler sur une piste de pierre entre deux colines. La route va très vite monter plus sérieusement et nous ferons notre pause de midi au sommet d'une coline à plus de 500 mètres d'altitude par rapport au campement (qui était déjà environ à 2000m) : la vue est saisissante ! Nous mangeons notre pique-nique quotidien préparé par notre super cuisinère au milieu des buses (pas vraiment au milieu, n'exagérons pas, mais pas loin), et la petite sieste à des airs d'envolée au paradis tant la terre semble lointaine et le ciel proche.
La redescente sur le campement se fera sans problème malgrès de grosses rafales de vent et une petite pluie pas bien méchante (après avoir pris la grêle deux fois, la pluie ressemble à une caresse ). Nous rentrons relativement tôt.
Comme le campement à été établi à proximité de la soeur de Jagi, nous sommes invités à partager de l'Airak (du lait de jument fermenté) : il s'agit d'une boisson alcolisée (frais, cela avoisine les 4-5°) un peu piquante mais assez bonne quand même. Pendant notre visite, la famille nous indique qu'il s'agit de l'heure de la traite des juments et nous assistons donc au rituel. Beaucoup d'enfants sont présents et après quelques minutes, un jeu s'improvise entre eux : attraper pour le plus petit des garçons un poulin blanc au lasso. Le spectacle va durer plus longtemps que prévu, le poulain faisant preuve d'une adresse, d'une énergie et d'une tenacité telle qu'au bout de presque une heure de poursuite à pied ou à cheval, personne n'aura réussi à l'attraper. Mais au passage cela nous aura encore une fois prouvé, s'il y en avait encore besoin, l'adresse et la tenue quasi surnaturelle du mongol sur la selle d'un cheval; impressionnant même chez les plus jeunes, qui montent à cru, un lasso dans une main, une cravache dans l'autre, un cheval à moitié sauvage entre les jambes, et tout va bien.

Comme annoncé, nous sommes au final montés en altitude et la belle rivière qui semble nous inviter à plonger dans ses eaux illuminées par le soleil couchant s'avèrera une garce glaçée ne demandant qu'à vous arracher vos orteils par le froid et le courant ! Le bon côté étant qu'à ce niveau d'immersion dans la vie nomade, nous avons - presque - oublié la sensation d'une douche chaude. Presque.